Je découvris qu'en bluffant les psychiatres on pouvait tirer des trésors inépuisables de divertissement gratifiants: vous les menez habilement en bateau, leur cachez soigneusement que vous connaissez toutes les ficelles du métier; vous inventez à leur intention des rêves élaborés, de purs classiques du genre qui provoquent chez eux, ces extorqueurs de rêves, de tels cauchemars qu'ils se réveillent en hurlant; vous les affriolez avec des "scènes primitives" apocryphes; le tout sans jamais leur permettre d'entrevoir si peu que ce soit le véritable état de votre sexualité. En soudoyant une infirmière, j'eus accès à quelques dossiers et découvris, avec jubilation, des fiches me qualifiant d' "homosexuel en puissance" et d' "impuissant invétéré". Ce sport était si merveilleux, et ses résultats - dans mon cas - si mirifiques, que je restai un bon mois supplémentaire après ma guérison complète (dormant admirablement et mangeant comme une écolière). Puis j'ajoutai encore une semaine rien que pour le plaisir de me mesurer à un nouveau venu redoutable, une célébrité déplacée (et manifestement égarée) comme pour son habileté à persuader ses patients qu'ils avaient été témoins de leur propre conception.